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20 janvier 189^. — Visite à la pointe est de l'île de la Cité. En creusant les fondations d'une maison,on a mis à nu un mur gallo-romain, dont les belles pierres de taille ressemblent à celles des Arènes de la rue Monge. Il est présumable que ce superbe mur de défense a été construit avec les pierres des Arènes quand le christianisme eut triomphé et proscrit les jeux du cirque.
16. — Les imaginations trottent ferme à propos du mur de la Cité, surtout depuis l'avis de MM. Héron de Villefosse et Cagnat, qui pensent trouver dans les pierres de ce mur d'anciens gradins des arènes de Lutèce. II paraît que certaines dépressions s'aperçoivent sur ces gradins. et alors quelques personnages d'esprit imaginatif en concluent que ces dépressions proviennent de ce que les Lutéciens et les Lutéciennes se sont souvent assis à l'endroit où les usures s'observent ! Fichtre! c'étaient des personnes de poids que ces Lutéciens et Lutéciennes quand ils se met­taient sur leurs séants !
S avril 1898. — Au.sud de l'École polytechnique, dans la rue Clovis, se trouve un superbe fragment de l'ancien mur de Philippe-Auguste; on l'aperçoit parfaitement de la rue; il soutient une espèce de fortification de terre, ombragée d'arbres. Et voilà qu'au nord de cette même École, dans la rue d'Arras, au n° 9, viennent d'apparaître au jour seize mètres décé même mur, qui, de nouveau, surgit du sol sur une hauteur d'environ trois mètres. Il y avait là probablement deux enceintes ?
ier décembre 1898. — Au Palais, le'jury d'expropriation vient de fixer Ies indemnités des propriétaires et industriel atteints par l'ouverture de la rue Dante jusqu'à la rue du Fouarre, à travers les rues Bornat et Galande. Cette rue Dante est déjà amorcée au boulevard Saint-Germain, non loin de la rue Saint-Jacques. Ce nom lui fut donné pour perpétuer le souvenir de Dante au quartier latin. Sa statue figure du reste dans l'un des squares du Collège de France. Dante étudia la théologie et la philosophie dans l'une des écoles de Ia rue du Fouarre, sous Ia direction de son maitre chéri Sigier. Boccace, dans sa Vie de Dante et dans une épître à Pétrar­que, parle de ce séjour du poète à Paris.
Dante lui-même parle indirectement de ce séjour, en mentionnant son maître Sigier au chant X, tiercet 46 du Paradis. Il le montre dans la demeure bienheureuse et le désigne ainsi :
Essa e la luce œterna di Sigieri Che leggendo nel vico degli stra»u Sillogi^o invidiosi veri.
(Cest la lumière éternelle de Sigier qui, enseignant dans la rue de la Paille, excita l'envie par la vérité de son raisonnement syllogistique.)