Charles IX ayant permis aux protestants de pratiquer les exer­cices de leur religion dans les faubourgs de Paris, ceux-ci s'établi­rent sur plusieurs points à proximité de la capitale. On les trouvait hors la porte Saint-Antoine, par delà le pont aux choux, dans un endroit appelé Popincourt (i) « en rase campagne avec de la boue jusqu'aux genoux » (2); près la porte du Temple, non loin de la Folie-Marcaut ou Folie-Méricourt, dans un jardin dénommé la Cerisaye (3); au faubourg Saint-Jacques, où ils bâtirent un prêche qu'ils désignèrent sous le nom de Temple de Jérusalem (4), et que les catholiques appelèrent « le tripot ; » et enfin au faubourg Saint-Marceau, dans un hôtel appelé le Patriarche (5), du nom d'un deses
(i) Le prêche de Popincourt se tenait dans une vieille maison ayant appartenu au président du Parlement Jean I-r de Popincourt, décédé le 21 mai 1503. Cette maison, avec ses dépen­dances, occupait une superficie considérable rue Popincourt, à l'angle de la rue des Aman­diers. Au XVIIe siècle cette propriété passa dans les mains des religieuses Annonciades, qui s'y établirent en 1654. L'église Saint-Ambroise actuelle et le boulevard Voltaire ont été cons­truits sur son emplacement.
Jean 1er, d'une famille seigneuriale du fief de Popincourt, près Roye en Picardie, était pré­sident du Parlement de Paris. Ce fut lui qui, en cette qualité, lu le 19 décembre 1475, au con­nétable Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, la sentence qui le déclarait « crimineux de crime de leze majesté et condamné comme tel à souffrir mort dedans le jour d'hui », ajou­tant : « Vous serez décapité devant l'Hôtel de cette ville de Paris, et toutes vos seigneuries, revenus et héritages sont acquis et confisqués au Roy, nostre sire. » Deux années plus tard, le 4 août 1477, il assista également à l'exécution du duc de Nemours, Jacques d'Armagnac (de Menorval, Paris depuis ses origines jusqu'à nos jours, t. II).
(2)  Lettre de Chantonay à Philippe II d'Espagne, en date du 21 décembre 1561 (Arch, nat., K 1495, n° 103).
(3) Ce prêche fut aussi le théâtre d'une collision entre catholiques et protestants, le dimanche 12 octobre 1561.
(4) Ce temple était situé rue des Sansonets ou du Puits-de-1'Orme ; cette petite rue existait au midi du Val-de-Grâce et descendait obliquement de la rue du faubourg Saint-Jacques à la rue des Bourguignons ; elle a disparu lors du percement du boulevard de Port-Royal.
Certains historiens veulent que ce prêche ait été situé sur les fossés de la porte Saint-Jacques cn face d'un jeu de paume appelé « la Bracque latin », dont Rabelais nous parle dans son Gargantua.
(5)  "L'Hôtel du Patriarche appartint d'abord à Guillaume de Chanac (a), 84e évêque de Paris, fondateur du collège de Chanac (b) situé rue de Bièvre. A la mort de ce prélat survenue en 1348, l'hôtel passa dans les mains du cardinal Bertrand de Chanac, patriarche de Jéru­salem, décédé en 1404, qui, dans son testament, en fit don au collège fondé par son parent Quelques années plus tard, les revenus du collège étant devenus insuffisants pour assurer l'en­tretien des élèves qu'il abritait, l'immeuble fut mis en vente et cédé à rente à un nommé Simon de Cramault (c), personnage important du règne de Charles Vl. L'hôtel comprenait alors tout le territoire circonscrit aujourd'hui par les rues .Mouffetard, de l'Epée-de-Bois, Monge et Daubenton, ct représentait une valeur considérable. Il se trouvait, de ce chef, grevé d'une très importante redevance envers l'abbaye de Sainte-Geneviève, dont il était tribu­taire. Cette redevance se composait de 3 sols de cens, 3 livres 4 sols de rente et 13 sep­tiers de vin. Le propriétaire n'ayant pu, ou voulu, acquitter les droits auxquels il était astreint, l'hôtel fut de nouveau rais en vente et adjuge, par sentence du Châtelet de Paris en date du 14 juillet 1443,1 Thibauld Carrache, bourgeois de Paris. Il appartint ensuite à Etienne